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L’imagerie révèle un texte caché de Claude Ptolémée

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Des chercheurs ont déchiffré un ancien manuscrit attribué à Claudius Ptolémée, mathématicien et astronome égyptien d’origine grecque, caché sous un texte latin et découvert il y a 200 ans.

Un manuscrit difficile à déchiffrer

Le texte en question, rédigé en grec sur parchemin, avait été découvert en 1819 par Angelo Mai, un cardinal et érudit spécialisé dans les textes anciens, dans une bibliothèque de l’abbaye de Bobbio, en Italie. Depuis, les experts ont eu du mal à déchiffrer le manuscrit, n’ayant pu décoder que des fragments. En effet, le parchemin étant coûteux, quelqu’un avait réutilisé les pages et imprimé un autre ouvrage, en l’occurrence l’Etymologiae de l’Espagnol Isidore de Séville, par-dessus un ancien écrit. Après analyse du document, une personne avait également « nettoyé » les pages dans une tentative de les lire, provoquant le brunissement de certaines parties.

Alexander Jones, co-auteur de l’étude et professeur à l’Institut d’études sur le monde antique de l’Université de New York, explique : « Angelo Mai avait aspergé les pages de produits chimiques pour effacer le texte latin. Sur certaines pages, il avait plutôt bien réussi à l’effacer. Et puis, vous avez aussi cette autre écriture directement sur le texte de Ptolémée. »

Une technique d’imagerie pour révéler le texte

Les chercheurs de l’Université de la Sorbonne et de l’Université de New York ont eu recours à l’imagerie multispectrale pour obtenir une vue optimisée du texte, car il était pratiquement impossible de lire plus de quelques mots isolés. Cette méthode leur a permis de « lire un peu plus de la moitié de ce qui était écrit », selon Jones.

Le texte révèle un manuel rédigé par le géographe Ptolémée expliquant comment construire un météoroscope, un instrument astronomique utilisé pour tracer des distances et étudier les étoiles. Composé de neuf anneaux métalliques pivotants, cet instrument permettait de s’orienter pour effectuer des calculs astronomiques. Ptolémée conseillait de construire un instrument d’au moins 30 centimètres de diamètre.

Claude Ptolémée, l’auteur de ce manuscrit ?

Les chercheurs n’ont pas pu trouver le nom de l’auteur sur les premières et dernières pages manquantes, mais certaines caractéristiques du texte indiquent qu’il s’agit de Claude Ptolémée. Jones explique : « Il a un style distinctif et utilise certaines phrases et mots que personne d’autre n’a utilisés dans toute la littérature grecque ancienne, ou presque personne, à moins d’avoir été influencé par lui. »

Le sujet du texte lui-même offre également des indices. « Nous avons trouvé un passage où l’auteur parle à la première personne, disant : ‘J’ai introduit une nouvelle terminologie pour certains angles utilisés en astronomie' », ajoute Jones. « Nous avons également un autre livre de Ptolémée où il utilise la même terminologie pour ces angles. C’est notre argument le plus solide pour affirmer qu’il s’agit bien de lui. » L’égyptologue Jean-Guillaume Olette-Pelletier, chargé d’enseignement à l’Institut Catholique de Paris ajoute : “Il s’agirait là de l’une des découvertes majeures concernant la vie et l’étendue des connaissances de ce savant. Claude Ptolémée fut notamment l’un des premiers cartographes de l’Antiquité. Ce parchemin offrirait alors l’une des anciennes clés méthodologiques utilisées aussi bien dans la cartographie terrestre que céleste.”

Cette découverte, publiée le 9 mars dans la revue Archive for History of Exact Sciences, ouvre de nouvelles perspectives pour comprendre les travaux de Ptolémée et l’histoire de l’astronomie et des instruments scientifiques au cours de l’Antiquité. La collaboration entre les chercheurs de l’Université de la Sorbonne et de l’Université de New York a permis de lever le voile sur un texte mystérieux et d’apporter des éléments inédits sur l’œuvre de ce savant égyptien d’origine grecque, dont les travaux ont été d’une grande importance pour le développement des connaissances en astronomie et en géographie.

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